Vous avez dit nérolium ?
Si le citron est roi à Menton, la bigarade est reine à Golfe-Juan et le nérolium est son conservatoire.
Visite de l’écomusée et de la boutique.
La ville de Vallauris Golfe-Juan peut s’enorgueillir de son nérolium. C’est une coopérative d’extraction des fleurs de bigaradier qui contribue à préserver un savoir-faire ancestral et un patrimoine floral majeur pour la Côte d’Azur.
Une commune au service des bigarades
Fin 19 ème siècle, quelques habitants de Vallauris Golfe-Juan plantent des bigaradiers, des oranges amères, pour fournir en fleurs les parfumeurs voisins de Grasse.
En 1885 ils sont plus de 150 propriétaires de bigaradiers qui décident de s’unir en syndicat afin de ne pas subir la mainmise des industriels grassois. 1904 voit la création de la coopérative nérolium et l’implantation d’une usine. Malgré la première guerre mondiale, l’âge d’or de la bigarade bat son plein jusque dans les années 1925. Ce n’est pas tant la crise financière de 29 qui ruine cette économie que la concurrence du Maghreb, les vagues de froid, l’urbanisation et sa pression foncière qui s’ajoutent à l’arrivée sur le marché des produits de synthèse.
La pression immobilière pousse les propriétaires à arracher leurs arbres
En présentant ses premières œuvres dans une des usines Nérolium, Picasso relance un peu l’intérêt pour les bigaradiers. Mais il manque toujours des arbres pour répondre à la demande ! De nombreuses familles préfèrent vendent leur terrain pour y construire un immeuble que de continuer à produire des récoltes plus ou moins hasardeuses.
La création de nouveaux débouchés via la fabrication de produits dérivés du fruit comme confitures, sirops, vins apéritif ; l’inscription au patrimoine mondial de l’Unesco ; la garantie d’une production d’huile essentielle totalement achetée par un grand nom de la parfumerie française ont contribué à la renaissance de la culture. Et tout est fait en plus pour aller vers une conversion au bio.
Le procédé de distillation bien expliqué
Par un film, par des schémas, par les cuves, les chaudières, les alambics encore présents sous l’immense hangar. On comprend aisément l’ajout de fleurs dans l’alambic dans lequel on introduit de la vapeur. Le cheminement dans le col de cygne pour l’échangeur crée la condensation et finit dans le décanteur en huile essentielle (le néroli) et en hydrolat (eau de fleurs).
Lors de ma venue, impossible d’assister à une distillation, le mois n’étant pas à la récolte des fruits. Mais on peut assister à la fabrication de confitures dans le strict respect des traditions artisanales et ancestrales.
Tout est bon dans la bigarade
Originaire du sud de l’Himalaya, le bigaradier a été transporté en Mésopotamie à l’époque romaine, en Syrie au X ème siècle ; puis en Sicile et en Andalousie.
Au départ il est prôné comme arbre de décoration dans les jardins mauresques (à Cordoue par exemple) ; avant la découverte de ses vertus cosmétiques et pharmaceutiques. En France, la ville de Nice le mentionne pour la 1 ère fois en 1336. Mais c’est surtout à la Renaissance que ses vertus conduiront à son exploitation.
Tout est utilisé dans la bigarade
Les fruits sont bien sûr utilisés pour l’alimentaire ; les fleurs distillées pour le néroli et leur eau pour la pâtisserie ; séchées, les feuilles peuvent devenir de bonnes infusions tout comme les boutons et pétales ; les brouts (rameaux feuillus taillés après la cueillette) servent pour fabriquer l’huile essentielle de petit grain. La récolte des fruits est de janvier à mars, celle des fleurs d’avril à mai et juin est le mois du brout.
Alors qu’en 1909 1 230 tonnes de fleurs étaient récoltées, la production actuelle est pour toute la coopérative de 2, 5 tonnes de fleurs ! Chaque arbre produit de 15 à 20 kgs de fleurs et bien plus évidemment de fruits. Le seul côté négatif est le très faible rendement de l’huile et il faut une tonne de fleurs pour 1 kg de néroli. Ce néroli servira de base parfumante à un jus, d’ingrédient souvent utilisé en tête de pyramide olfactive dans la composition d’une fragrance.
A la boutique sont proposés tous les produits faits par le nérolium : confitures, vins, sirops, eau de fleurs ; l’occasion quand on passe dans l’un ou l’autre des lieux de remplir son panier de douceurs d’agrumes très parfumées.
L’écomusée est ouvert de mai à mi-décembre au 140 av de la Liberté à Golfe-Juan (04 93 63 74 29) et la boutique de Vallauris se fond dans une grande jardinerie où les produits nérolium se mélangent à d’autres (16 bis av. Georges Clémenceau, 04 93 64 27 54).
Toute info sur www.nerolium.fr et www.cotedazurfrance.fr