La Fontaine et le Château des princes de Condé
L’anniversaire de la naissance du génial fabuliste en avril 1621 donne lieu à plus de 200 manifestations culturelles ; témoignant ainsi de l’actualité de l’œuvre de Jean de La Fontaine.
Visite au Château de Condé où les décors peints s’inspirent des contes de La Fontaine.
Jean de La Fontaine est certes connu pour être un fabuliste de génie ; mais c’est oublier qu’il fut aussi un auteur de contes licencieux, de romans libertins, d’odes anticléricales.
En fin de vie pour se racheter une bonne conduite, il dut d’ailleurs renier ces œuvres. Mais on ne pense qu’à elles au château de Condé car les murs ne font que célébrer l’Amour et les amours.
Je vous entraine à Condé car certains de ses décors muraux peints dévoilent les ‘Contes libertins’ de La Fontaine publiés entre 1665 et 1671 et son roman poétique ‘Les Amours de Psyché et de Cupidon’ (1669).
Quelques mots d’histoire
Aux portes de la Champagne, cette superbe demeure est celle de François de Bourbon, l’ancêtre de tous les rois de France depuis Henri IV, des 1 ers princes de Condé (à Chantilly c’est le 4 ème prince de Condé qui est le propriétaire), du cardinal de Richelieu, d’une des mazarinettes, Olympe Mancini, inquiété lors de l’affaire des poisons, ect….
Face à un tel passé historico-royal et à une telle généalogie architecturale, on peut comprendre que la famille Rochefort ait succombé au charme des lieux en achetant la propriété en 1983. Un décès prématuré de son père contraint Aymeri de Rochefort à reprendre le domaine à l’âge de 22 ans et à s’y consacrer. C’était sans compter sur les travaux permanents à entreprendre, les tracasseries administratives à subir, les contraintes d’ouverture au public lequel fait cruellement défaut depuis la crise sanitaire, la nécessité d’être en même temps jardinier, plombier, organisateur d’évènementiel, comptable.
Cependant Aymeri est fou amoureux de ‘ses’ pierres, de ‘ses’ décors intérieurs et il se bat au quotidien pour entretenir, embellir pour le public, pour les générations à venir ce joyau patrimonial. On ne peut qu’admirer et lui en être très reconnaissant ; d’autant qu’étant habité ce château, à l’opposé d’autres, a une âme et que c’est à lui qu’on doit cette ambiance particulière.
Quelques pièces d’exception
Le salon Servandoni
Avant d’y accéder vous emprunterez le bel escalier d’honneur du XVIIIème siècle ; l’artiste italien étant à la fois sculpteur et architecte. Au 1 er une très grande salle de réception entièrement peinte de scènes mythologiques de Servandoni.
Peints sur des toiles posées à 5 cm du mur, les trompe-l’œil sont majestueux : Apollon et des nymphes, les bains d’Apollon dans la grotte de Thétys à Versailles, l’enlèvement de Proserpine, ect autant de scènes représentant l’Amour Galant et l’ouvrage licencieux de La Fontaine.
La chambre d’Olympe
La benjamine des sœurs Mancini, Olympe, y a couché en visite à sa sœur Marie Anne en résidence au château en 1664 et 1665. Une situation dans l’ancien donjon, du mobilier d’époque avec une bergère XVIII ème siècle avec ‘oreillettes’ pour limiter les courants d’air. Une pièce rendue chaleureuse par sa cheminée, sa chaufferette et une peinture dans le goût de Watteau « le villageois ayant perdu son veau » qui reprend un conte de Jean de La Fontaine.
Le salon des Oudry
Il est rare de voir regroupé en un même lieu autant de grandes peintures d’Oudry, le peintre officiel des chasses de Louis XV. Oudry a peint ces scènes de chasse, de pêche, de chiens vers 1725. Somptueux ensemble qu’on aurait pu trouver au Musée de la Chasse et de la Nature ou au Musée Nissim de Camondo tellement la facture est belle, pure. Même les boiseries, les dessus de portes et de cheminée ont des attributs liés à la chasse, la pêche, la nature avec force coquillages, fusils, des éléments très prisés et à la mode au XVIII ème siècle.
Une fois ces retours de chasse, ces chiens et ces poissons pêchés admirés ; surprise totale quand le miroir se lève : au hasard d’une restauration a été découvert caché derrière la glace une peinture intacte. « La fiancée du roi de Garbe » révèle un conte libertin que La Fontaine a publié en 1666. Heureusement que von Bulöw occupant le château ne l’a pas brûlé !!
Château de Condé
Condé
02 330 Condé en Brie