Lartigue 1910, une EPV du pays basque

Philippe et Caroline Lartigue marchent dans les pas de la famille en ayant créé Lartigue 1910, une marque et des collections traditionnelles basques, qui ont reçu le label Entreprise du Patrimoine Vivant.

Focus sur du linge basque respectueux des traditions même si des designers renouvellent le style en lui apportant la vivacité de couleurs plus chaudes.

Visite de l’atelier d’Ascain.

De la mante à boeufs au linge de table, de bain et et de plage

Dès le 16 ème siècle, l’art du tissage en Béarn et au pays basque prend son essor quand la nappe recouvre la table familiale pour les jours de fête. Au milieu du 19 ème, plus de 500 familles de tisserands, les ‘Ehuleak’, vivent de la filière lin toute tournée vers cette plante qui est récoltée, égrenée, rouissie, séchée, battue, filée par les femmes alors que la tâche des hommes est plutôt de le tisser. Tous les métiers se développent dans la région ; le lin étant réputé solide pour la protection, l’habillement et même la chausse. L’énergie utilisée étant le réseau hydraulique, les tisseurs s’installent plutôt en Béarn pour profiter des gaves qui descendent des Pyrénées.

Les boeufs et leur mante à Biarritz

A l’origine, le linge basque est la mante, une grande toile de lin aux 7 rayures colorées (les 7 provinces basques) posée sur le dos des bêtes de somme. Le folklore a laissé dire que cette toile protégeait les bœufs des insectes ; mais l’interprétation réelle est la volonté du propriétaire de l’attelage bovin de signifier son appartenance à un corps de métier : rouge pour les éleveurs, vert pour les agriculteurs, bleu pour les pêcheurs. Quant à la largeur des rayures, il semble qu’elle indiquait la position sociale de la maison. Néanmoins protéger les bœufs des piqûres de moustiques était important aussi.

 

Disparition des attelages de bœufs, évolution vers une toile plus fine et en coton ; le linge basque a pris la direction de la cuisine et de la salle de bain, une évolution fortement soutenue par le développement du tourisme dans la région. Aujourd’hui chez Lartigue 1910, plus de lin, mais du coton peigné en provenance d’Inde. Le coton est commandé écru avant d’être teinté par la société Lepère de Nay en quelques 60 coloris au label Oeko Tex.

Une transmission familiale plus que centenaire

Utilisant l’énergie hydraulique du gave d’Oloron pour entraîner ses métiers à tisser, Philippe Lartigue s’installe à Oloron Sainte Marie en 1910 dans une ancienne tannerie qui abrite encore aujourd’hui la fabrique. Cet établissement de Bidos se dédie à la fabrique de toiles d’espadrilles pour fournir les fabricants de Mauléon et Oloron et à la confection de bérets. Une centaine de personnes travaille alors dans l’atelier historique.

Les bobines après teinture par la maison Lepère aussi qualifiée EPV

Le coton écru arrive d’Inde

Mais les années 1980 voient s’effondrer le marché de l’espadrille ; les grandes surfaces s’approvisionnant directement en Asie. Cet effondrement du marché contraint la famille à racheter un petit fabricant de linge basque. Les Tissages Lartigue naissent et se recentrent sur le linge de maison en stoppant net la toile d’espadrilles pour d’autres maisons.

Les stylistes insufflent de la créativité et de la modernité ajoutant aux rayures classiques des bayadères vives et colorées : le produit devient design.

En 2011 les Tissages Lartigue lancent leur propre collection sous la griffe Lartigue 1910. Entrepôts et ateliers de fabrication sont visibles à Ascain que le public peut visiter. Il est intéressant donc de s’immerger au milieu de rouleaux de tissus, pour appréhender les kilomètres de fils de coton (pas moins de 5 500 fils pour 1 m 80 de large de toile sont nécessaires ; m’explique Sophie lors de ma visite) qui s’emmêlent au gré des dessins désirés.

D’un côté le roulis permanent des métiers à tisser en un va et vient sans fin ; de l’autre côté les petites mains des couturières qui ourlent, surpiquent, cousent, assemblent les pièces de tissus. Elles ne sont que 5 couturières dans chaque atelier à Bidos et à Ascain pour créer des pièces aussi variées qu’un tablier, une panetière, un coussin, un sac de plage ou une nappe.

Des collections qui surfent sur les tendances

Couleurs et originalité caractérisent les collections de 1910 Lartigue qui propose une trentaine de modèles allant de la toile traditionnelle à la toile enduite et à la toile plus épaisse à transat. S’ajoutent des produits dérivés tels que sacs de plage, trousses de toilette, étuis à portable ou lunettes…. De même les rayures et bayadères sont complétées par du sergé et des chevrons. Néanmoins le travail se poursuit toujours et encore dans le respect des traditions en liaison avec un savoir-faire local et ancestral.

Si l’entreprise réalise des fabrications en série, elle peut aussi faire du sur-mesure. Donc si vous retrouvez à la cave un fauteuil dont la garniture et le tissu ont besoin d’être rafraîchis…….

La consécration avec le label EPV

Obtenu en 2017, la société peut s’enorgueillir de bénéficier du label prestigieux de reconnaissance d’un métier d’excellence associé à des techniques ancestrales, à savoir l’EPV, entreprise du patrimoine vivant. Mais aujourd’hui Lartigue 1910 va plus loin encore et Philippe Lartigue de travailler à une IG, une indication géographique. Avec l’IG, son but est d’obtenir que tout ce qui n’est pas tissé dans le département (Pyrénées Atlantiques) ne pourra bénéficier de la mention « linge basque ». Lartigue 1910, Tissage Moutet et Ona -Tiss seraient les 3 seules sociétés habilitées à pouvoir parler de « linge basque » et vendre du « linge basque » ; les autres maisons présentes partout de St Jean de Luz à Biarritz ou à Bayonne étant des fabrications parfois françaises mais non locales ou (pire encore) fabriquées en Espagne ou au Portugal sous étiquette basque.

Couturières à l’oeuvre

 

2 magasins d’atelier à Bidos (05 59 39 50 11) et à Ascain (05 59 26 81 81) offrant la possibilité de 4 visites gratuites par jour avec accompagnateur.

www.lartigue1910.com

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